Premières élections au suffrage universel direct et premières contestations. Février à Juin 1848,
de la demande de report à l’insurrection armée
Gaëtan Nory
Résumé
La contestation électorale est-elle le propre de nos systèmes représentatifs contemporains ? À étudier le déroulement des premières élections au suffrage universel (masculin) direct de l’histoire française, la réponse paraît négative. En effet, lorsqu’au lendemain de la révolution de Février 1848, le Gouvernement provisoire annonce la tenue des élections constituantes pour avril, il dut faire face à une opposition ferme des républicains les plus convaincus. Paradoxe de l’histoire, ce sont ceux qui se sont battus durant les monarchies censitaires pour l’instauration du suffrage universel qui vont mener la contestation contre des élections. Un élément qui ne peut se comprendre que dans le contexte particulier de 1848, celui d’une lutte entre différentes instances de représentation (clubs, gouvernement révolutionnaire, corporations et assemblée élue) et entre plusieurs définitions de la république (démocratique et sociale ou honnête et bourgeoise). Dans ce cadre, les élections pouvaient être interprétées non pas comme un mode d’expression du peuple souverain, mais comme un moyen pour les notables de renverser le cours de la révolution et de revenir sur ses acquis. Ce refus des élections prit des formes très variées, allant de l’usage de la presse, à celui des réunions publiques, en passant par l’insurrection armée, l’envahissement de l’hémicycle et l’invention de la manifestation dans son sens moderne. Cet article entend, sans prétendre à l’exhaustivité, présenter les formes et les objets des contestations des premières élections tendant à l’universel, que cela soit par les mauvais joueurs (avant le vote) ou les mauvais perdants (après le vote).
Abstract
Is electoral protestation a feature of contemporary representative democracy? If we look at how the first direct elections by universal (male) suffrage in French history unfolded, the answer would seem to be no. In fact, when, in the wake of the February 1848 revolution, the Provisional Government announced that constituent elections would be held in April, it encountered strong opposition from the most convinced republicans. Interestingly, it was those who had fought for the introduction of universal suffrage during previous monarchies who were to spearhead the opposition to the elections. This can only be understood within the specific context of 1848, when there was a struggle between different representative bodies (clubs, the revolutionary government, unions and the elected assembly) and between different definitions of the republic (democratic and social or honest and bourgeois). Elections could be seen not as an expression of the sovereign people, but as a means for the notables to reverse the course of the revolution and roll back its gains. This rejection of elections took a variety of forms, ranging from the use of the press and public meetings, to armed insurrection, invasions of the Chamber and the invention of modern demonstrations. This article attempts to present the forms and objects of protests in the first elections by universal suffrage, whether by the bad players (before the vote) or by the bad losers (after the vote).
How to cite
Nory, Gaëtan. 2024. Premières élections au suffrage universel direct et premières contestations. Février à Juin 1848, de la demande de report à l’insurrection armée. Nomopolis 2.
Le dimanche 23 avril 1848, dimanche de Pâques, plus de neuf millions de citoyens sont appelés à voter pour participer au premier vote au suffrage universel direct et masculin de l’histoire française. Un premier essai de suffrage tendant à l’universel avait eu lieu en septembre 1792, durant la Première République. Mais le nombre d’exclus (mendiants, domestiques, femmes…), son caractère indirect à deux degrés et la faible participation, moins de 20 %, ont réduit son importance. L’idée d’associer république et corps électoral élargi commença néanmoins à s’implanter. Ce que renforça la constitution, non appliquée, de 1793 en prévoyant le suffrage universel direct masculin.
Après des années à revendiquer le retour de ce suffrage, les républicains rétablirent celui-ci à l’avènement de la Seconde République. Dès le 24 février, dernier jour des combats, le Gouvernement provisoire déclare aux insurgés que le peuple « sera immédiatement consulté. ». Cette proclamation est reprise au Moniteur universel du 25 février. Un arrêté complète l’ensemble et précise : « Une assemblée nationale sera convoquée aussitôt que le Gouvernement provisoire aura réglé les mesures d’ordre et de police nécessaires pour le vote de tous les citoyens. ». Le 2 mars, un projet de décret est prêt et présenté au gouvernement. Le même jour, ce dernier proclame l’adoption à l’unanimité du principe du suffrage universel et le décret organisant les élections à la Constituante est publié le 5 mars. En 10 jours la France jette les bases d’un fonctionnement électoral moderne et fait entrer des millions de français dans la sphère de la vie politique.
Aussi bien Daniel Stern que Charles de Rémusat, deux contemporains de 1848, y voient là, respectivement, « la révolution véritable. » et « le fait capital de l’année 1848. » (Garrigou, 1991, p. 161). La légitimité acquise par l’Assemblée constituante via ce scrutin est telle qu’elle éclipse totalement les autres formes de représentations populaires issues de la révolution (Gouvernement provisoire, clubs politiques, corporations et organisation autonome de la garde nationale (Hayat, 2011).
Conséquence inattendue du scrutin, la plus grande participation électorale des citoyens les a privés de leurs autres moyens d’action politique. De ce point de vue, il n’est pas évident que le suffrage universel ait, en 1848, constitué un progrès démocratique. Ce sont d’ailleurs les républicains avancés qui s’opposeront le plus au scrutin pour lequel ils se sont pourtant battus. Dans ce groupe hétéroclite sont rassemblés les républicains de la première heure, « de la veille » (souvent depuis 1830). Ils peuvent être socialistes ou socialisants ou accorder une moindre place à la question sociale (Ledru-Rollin, Marrast, Garnier-Pagès…). Parmi les socialistes ou socialisants, certains ne renoncent pas à prendre les armes et à mener des insurrections armées, comme Blanqui, Barbès ou dans une moindre mesure Raspail, tandis que d’autres préfèrent l’action écrite ou orale, comme Proudhon, Louis Blanc, Cabet, Leroux ou la plupart des féministes.
Face à eux, les républicains modérés sont souvent convertis après la révolution, d’où l’appellation de républicains « du lendemain ». Ils sont moins sensibles aux revendications sociales et préfèrent défendre une République formelle, recentrée sur des institutions représentatives électives et les droits civils et politiques (les droits de première génération). Des droits qu’ils peuvent restreindre au besoin (notamment les libertés de réunion et de la presse). On trouve ici Cavaignac, Lamartine ou Garnier-Pagès. Ils dominent le Gouvernement provisoire et l’emportent largement aux élections d’avril. Ce sont eux qui mènent la répression des journées de Juin et du 15 mai, provoquant (entre autres causes) la séparation entre les masses et la République. Ils perdent l’élection présidentielle et ne représentent qu’un peu plus de 10 % des députés en 1849.
Enfin, un dernier groupe, peu présent encore dans le paysage politique avant les élections d’avril, mais grand vainqueur de celles de décembre 1848 et mai 1849, est celui des conservateurs du « parti de l’Ordre ». La majorité d’entre eux sont royalistes et ils sont pour beaucoup issus du personnel politique de la Restauration et de la monarchie de Juillet. Bien que principale force de la Seconde République dès décembre 1848, leur opposition à Louis-Napoléon, qu’ils ont soutenu à la présidence, et leurs divisions internes les empêchent de rétablir la monarchie. Ils vont néanmoins mener une politique réactionnaire contre les acquis de février et mars 1848 et restreindre le corps électoral par la loi du 31 mai 1850.
Ces ensembles datent de l’époque et ne sont pas des reconstructions d’historiens, mais il ne faut pas y voir des partis politiques au sens moderne, ni même des groupes vraiment structurés. Les individus qui composent chacun des groupes ont des sensibilités et des lieux de sociabilité et d’action assez variés. Ce qui peut les conduire à s’opposer entre eux. Comme, par exemple, entre Blanqui et Ledru-Rollin ; le premier souhaitant ajourner les élections, ce que ne souhaite pas le second.
Ce paradoxe, la contestation des élections par ceux qui ont lutté pour les voir arriver, ne peut se comprendre qu’en étudiant les arguments développés. En effet, les opposants au vote ne critiquent pas le principe même du scrutin, mais se concentrent, en suivant la temporalité électorale, d’abord contre ses modalités (I) puis ses résultats (II).
I. CONTESTER LE SCRUTIN AVANT L’ÉLECTION, VOULOIR CHANGER LES RÈGLES DU JEU POUR NE PAS LE PERDRE
La question de l’extension du corps électoral avait fait l’objet d’intenses débats durant la monarchie de Juillet. Le projet d’une réforme électorale revint pas moins de dix fois à la Chambre entre 1841 et 1847 et cette question fut brûlante dans les deux dernières années du régime. En janvier 1846, Ledru-Rollin et Duvergier de Hauranne prennent la parole en faveur d’une extension du corps électoral par l’abaissement du cens et en mars 1847, la Chambre rejette un projet en ce sens. La campagne des banquets qui débute à l’été et qui entraîne la chute de la monarchie de Juillet s’ouvre précisément sur le thème de la réforme électorale.
Dès lors, une fois la république proclamée, on ne s’opposa pas à la mise en place du suffrage universel, la critique se concentra sur les modalités de celui-ci (A). Cet accord sur le principe éclaire sur la conduite des opposants au scrutin d’avril, puisqu’ils y ont finalement participé (B).
A. Les divers objets de contestation
Tenter de résumer ici les objets et arguments de l’opposition au scrutin est particulièrement difficile. Les contestations vinrent de toutes les sensibilités et furent protéiformes. Nous ne pourrons ici prétendre à l’exhaustivité, mais aborderons deux points essentiels, la question de l’étendue du suffrage et celle de sa sincérité.
L’article 5 du décret du 5 mars 1848 dispose simplement : « Le suffrage sera direct et universel. » et le gouvernement proclame le 16 mars que « L’élection appartient à tous sans exception. » et « Tout français en âge viril est citoyen politique. Tout citoyen est électeur. ». Pourtant, sur une population de 36 millions d’habitants (Henry et Blayo, 1975, p. 91), neuf millions de personnes seulement sont électeurs (Blachèr, 2013, p. 261)[1]. C’est que les causes d’exclusion sont nombreuses.
Le décret du 5 mars abaisse l’âge d’électeur de 25 à 21 ans (30 ans sous la Restauration) et d’éligibilité à 25 ans (au lieu de 30). Sont aussi exclus les étrangers et les privés de l’exercice de leurs droits civiques (faillis, condamnés à une peine afflictive ou infamante, individus soumis par jugement à la surveillance de la Haute police…). Sur ces points, nous n’avons pas rencontré au cours de nos lectures d’opposition.
L’obligation de résidence d’au moins six mois aurait pu limiter le vote des marginaux et des précaires, comme ce fut fait avec le rallongement de ce délai par la loi du 31 mai 1850. Mais le décret du 5 mars prévoit des aménagements pour permettre l’inscription sur les listes, même en cas de changement récent de domicile.
L’exclusion la plus importante numériquement est celle des femmes. La question du vote féminin est partie intégrante de la lutte pour l’émancipation qui renaît au printemps 1848 (Ranvier, 1908 ; Sullerot, 1966 ; Riot-Sarcey, 1992 ; Fraisse, 1992). Plusieurs journaux sont fondés et dirigés par des femmes, le plus important d’entre eux étant La Voix des femmes. Publié presque sans interruption du 20 mars au 29 avril, il ralentit en mai, puis disparaît le 18 juin. Des clubs féminins, tout à la fois lieux de débats et organisation politique, apparaissent et des féministes comme Désirée Gay ou Eugénie Niboyet y prennent des responsabilités.
Or, les critiques contre l’exclusion des femmes furent surtout le fait des femmes elles-mêmes. Le 16 mars, la Société pour l’émancipation des femmes publie un manifeste précisant : « Enfin, pour clé de voûte à l’édifice de leur émancipation, leurs droits politiques. », et « Comment payer l’impôt qu’on a pas voté soi-même ou par des mandataires de son choix ? Comment accepter des lois pour lesquelles on a pas été consulté ? ». Le 22 mars, un comité Des droits des femmes dépose une pétition au gouvernement pour demander l’égalité des droits.
La Voix des femmes pose la question électorale dès son premier numéro : « quand le moins intelligent citoyen a le droit de vote, la plus intelligente citoyenne est encore privée de ce droit. ». Cette question occupe une place très importante dans presque tous les numéros du journal. Les rédactrices tentent aussi d’influer sur la campagne en soutenant la candidature de George Sand. Mais celle-ci refuse d’être candidate et accuse le journal d’usurpation, alors qu’il ne fut pas à l’origine de l’opération. La stratégie de présentation de candidatures féminines fut reprise aux élections législatives de mai 1849 (Ranvier, 1908).
En avril, avec l’approche des élections, un basculement s’opère. La revendication du droit de vote disparaît pour laisser place à des conseils plus immédiats. Confronté au manque de relais dans le reste de la sphère politique, le journal appelle les femmes à peser sur les élections depuis l’extérieur du système, c’est-à-dire depuis l’intérieur du foyer où elles sont reléguées (en ce sens son numéro du 24 mars). Il va aussi, dès le 22 mars et jusqu’aux élections, publier les professions de foi de candidats qui trouvent grâces à ses yeux. Le 14 avril, les rédactrices proposent même une liste de candidats pour le département de la Seine (le scrutin est à un tour et de liste, que doivent constituer les électeurs eux-mêmes, par département).
En dehors des cercles féministes, les femmes pèsent trop peu, voire sont exclues. Ainsi, dans le mouvement clubiste, si important au printemps 1848 (Hayat, 2011), les femmes n’ont accès, parmi les grands clubs, qu’à celui de Cabet. Même Blanqui, qui ne se montre pas hostile à l’émancipation des femmes, laisse son club refuser leur adhésion (Dommanget, 1972, p. 43).
Trois ans plus tard, lorsque le député Pierre Leroux propose à la Chambre, le 21 novembre 1851, d’inclure les femmes dans la liste des électeurs communaux, il fut, chose rare, plusieurs fois interrompu par l’hilarité générale et même, chose encore plus rare, coupé par une moquerie du président de l’Assemblée.
Le point qui fut l’objet du plus de crispations fut celui de la date des élections. Puisque le Gouvernement provisoire avait pris dans ses mandats initiaux la consultation rapide des Français, le décret du 5 mars fixait l’ouverture des élections au 9 avril. Beaucoup de socialistes, démocrates ou républicains avancés s’opposèrent frontalement à la tenue précoce des élections. Le principal opposant parmi eux fut Blanqui (Dommanget, 1969, 1971, 1972). Il est, avec son club, la Société républicaine centrale, l’un des moteurs de la grande manifestation du 17 mars pour l’ajournement.
Mais Blanqui est loin d’être isolé dans sa lutte pour l’ajournement des élections, Cabet, Barbès ou encore Proudhon (Chambost, 2018) et leurs affiliés sont du même avis. Dans la première adresse du Club Blanqui au gouvernement, du 6 mars, il précise :
« N’oubliez pas qu’entre une Assemblée élue demain et une Assemblée élue dans trois mois, il y a tout un abîme. Le vote de demain serait une surprise et un mensonge ; suffisamment ajourné, ce vote sera un vote libre, une vérité. »
Quelle en est la principale raison ? Les Français ne sont pas mûrs pour voter. Blanqui, dans la même adresse estime que les élections ne seront pas sincères, car « Depuis cinquante ans, la contre-révolution parle seule à la France. » La presse n’était alors pas libre et donc l’éducation politique impossible, avec une situation comparable pour les réunions et les associations. Or, il faut du temps pour éduquer les populations. C’est pour la réalisation de ce programme que la Société républicaine centrale avait demandé dès son adresse du 2 mars « La liberté complète et illimitée de la presse », « La liberté entière de circulation des œuvres de la pensée, par toutes les voies possibles » et « le droit absolu et imprescriptible d’association et de réunion. » Ce qui est demandé, c’est la possibilité d’un débat démocratique sain comme préalable à toute élection. Des pétitions et une adresse adoptées par son club les 6, 14 et 17 mars réitèrent la demande d’ajournement.
Cabet ne dit pas autre chose dans son journal Le Populaire du 16 mars à propos des élections à la garde nationale, puis du 30 mars à propos des élections à la Constituante.
Même le ministre chargé de la mise en place des élections admet à demi-mot et dans une circulaire officielle qu’elles sont précipitées, mais ne souhaite pas les ajourner pour autant. Dans sa circulaire du 12 mars aux commissaires du gouvernement, qui remplacent avec des pouvoirs étendus les préfets, Ledru-Rollin précise : « L’éducation du pays n’est pas faite. C’est à vous de le guider », car « Il faut qu’elle [l’assemblée], soit animée de l’esprit révolutionnaire, sinon nous marchons à la guerre civile et à l’anarchie. »
Ledru-Rollin précise sa position dans le numéro du 27 mars de La Réforme, publié après la prorogation des élections au 23 avril. Il se félicite de la courte prorogation obtenue par les opposants : « Si l’on avait attendu plus tard, les influences contre-révolutionnaires qui guettent et qui empoisonnent nos frères des campagnes nous auraient donné des représentants de la fonction, du capital et de l’aristocratie. » L’objectif est alors le même que ceux qui demandent l’ajournement, mais avec un argument inverse. Au lieu de convaincre les citoyens par l’éducation populaire, il faut faire rapidement les élections pour ne pas laisser le temps au camp adverse de s’organiser. Il précise pourtant que ce camp dispose d’une « suprématie séculaire »…
Raspail est sur la même ligne que le ministre. Dans L’ami du peuple du 28 février, il demande l’annonce rapide d’élections. Dans le numéro du 30 mars, il critique même l’ajournement de 14 jours en estimant, lui, que les élections auraient dû se tenir « dans la quinzaine » de la révolution, pour profiter de l’élan républicain.
Le Comité central républicain lutte aussi contre l’ajournement. Ce comité diffuse dès le 15 mars une pétition à Paris visant à maintenir les élections et utilise ses réseaux dans les départements pour multiplier les demandes du même genre. Des pétitions en provenance de 36 départements arrivent au gouvernement, parfois appuyées par des commissaires du gouvernement (Crémieux et Génique, 1906, p.260-262). Des citoyens ou des administrations locales envoient aussi adresses et pétitions pour le maintien des élections et surtout pour ne pas laisser Paris décider seul du sort de la France (Crémieux et Génique, 1906, p. 259).
Le choix du mode de scrutin fut aussi l’objet de critiques. Elles portent sur deux points. On s’en prend soit au choix du vote au chef-lieu de canton, où un seul bureau est formé et où les électeurs sont convoqués commune par commune. Un choix qui occasionne des déplacements parfois longs et met les individus d’une commune sous le contrôle des notables de celle-ci au moment d’aller voter. Les citoyens retardataires peuvent voter le soir. Et l’on critique aussi le choix d’un scrutin de liste. Le scrutin est par liste départementale, les votants doivent inscrire autant de noms sur leur bulletin qu’il y a de députés à élire pour le département. Les candidatures se font individuellement, ainsi chaque électeur doit composer sa propre liste.
Si ce choix permet de laisser une grande marge de manœuvre aux électeurs, il est particulièrement mal adapté à une campagne électorale aussi courte, alors qu’aucun parti politique n’est constitué et qu’une grande partie du personnel politique est à renouveler du fait du changement de régime. Il impose aux électeurs de connaître des dizaines de programmes (quand ils existent) et de personnalités dans chaque département. D’autant que les candidatures sont très libres. Les professions de foi pullulent et comme aucune aide n’est prévue pour les diffuser, chacun a sa méthode en fonction de ses moyens. Dans l’Isère, où 15 députés sont à élire, P. Vigier dénombre 56 candidats (p. 17). Que dire de Paris, de ses 34 députés et de son activité politique autrement plus développée ? Pour aider à y voir plus clair, des clubs, journaux ou comités électoraux proposent des listes toutes prêtes. Mais à leurs tours, elles foisonnent (10 rien que pour l’Isère, avec des candidats présents sur plusieurs listes).
On comprend alors les critiques du scrutin qui empêcherait un choix éclairé, remettant en cause la sincérité des élections. Raspail, dans son journal du 12 mars, refuse le vote par liste, pensant qu’il s’agit là d’une simple recommandation gouvernementale et qu’il ne faut pas en tenir compte. Le 18 avril, une pétition du club Soufflot au gouvernement s’élève contre le scrutin de liste, qui créerait une sorte de premier tour pour le choix des candidats. Des brochures sont même imprimées contre ce scrutin qui favoriserait les notables sur les inconnus (Crémieux et Génique, 1906, p. 207).
Mais ces efforts sont vains. Le Gouvernement, d’après Garnier Pagès, avait été contraint de choisir ce mode pour éviter le long et fastidieux travail de redécoupage des circonscriptions qu’impose un changement aussi brutal du corps électoral. Le choix du canton serait venu lui d’une demande de Marrast, membre du gouvernement, qui cherchait paradoxalement à éviter les influences néfastes des curés et des maires en poste depuis la monarchie de Juillet (Garrigou, 1991, p. 172-174).
Une dernière contestation antérieure à l’élection, émise cette fois par les conservateurs, concerne le rôle des commissaires du gouvernement. Emportés par le flot d’adhésion à la république, dont le Moniteur universel se fait chaque jour l’écho, encore en avril, ils ne peuvent contester le principe même de l’élection. Néanmoins, les circulaires des 8 et 12 mars du ministre de l’Intérieur vont constituer un point de crispation. Le ministre entend, par le biais de ses commissaires, neutraliser les administrations locales datant de la monarchie et influencer les électeurs en faveur d’idées républicaines avancées.
Dans sa circulaire du 8 mars, Ledru-Rollin encourage les commissaires à rénover les « fonctions politiques, à quelque degré de la hiérarchie que ce soit », en ne choisissant que « des républicains éprouvés », l’objectif est clair, « Qu’ils nous donnent une assemblée nationale capable de comprendre et d’achever l’œuvre du peuple. En un mot, tous hommes de la veille et pas du lendemain. »
Dans celle du 12 mars, il précise : « Mettez-vous en garde contre les intrigues des hommes à double visage qui, après avoir servi la royauté, se disent les serviteurs du peuple » et : « pour briguer l’honneur de siéger à l’Assemblée Nationale il faut être pur des traditions du passé. Que votre mot d’ordre soit partout : des hommes nouveaux, et autant que possible sortants du peuple. » Et enfin il conseille : « examinez sévèrement les titres des candidats. »
Ces deux circulaires provoquent la colère des conservateurs qui s’élèvent contre elles, dont l’influent journal La Presse de Girardin (Hayat, 2011, p. 449). Le Garde national du 17 mars, imprimé à Marseille, y voit une atteinte « à la liberté des votes » et fait part de son « vif sentiment de peine » et de sa « profonde affliction ». Ces circulaires seront au cœur de la manifestation du 16 mars durant laquelle les ex-compagnies d’élites protestent contre leur incorporation dans les rangs ordinaires de la garde nationale. Avec le soutien des autres membres du gouvernement, Ledru-Rollin ne retire pas ses circulaires.
Pourtant, les résultats des commissaires furent bien maigres. À plusieurs reprises ils sont chassés par des populations qui les jugent trop radicaux et le gouvernement se voit contraint de les remplacer. Ils manquent d’énergie et leur action est souvent invisible. C’est le cas des trois commissaires du gouvernement dans l’Isère et le Dauphiné (Vigier et d’Argenton, 1949, p. 14). Frédéric Deschamps, commissaire du gouvernement à Rouen, sera au contraire très impliqué dans la campagne, mais sans succès (Peyrou, 1998).
Il est possible de voir dans la variété de ces critiques un débat public qui s’est largement ouvert au printemps 1848. Ce qui est mesurable par la multiplication du nombre de journaux (Ambroise-Rendu, 1999 ; Charles, 2004 ; Hayat, 2011 p. 325 et 2022) et la création d’une constellation de clubs (Lucas, 1851 ; Wassermann ; 1908 et 1913 ; Amann, 1975 ; Hayat, 2011, p. 325). La démocratie naissante est alors en pleine construction et les conflits autour de la définition de la république trouvent une expression dans les contestations des modalités du suffrage. Les prémisses d’une campagne politique moderne sont bien présentes (professions de foi, implication de la presse, affichages publics…). Mais des archaïsmes demeurent : absence d’un droit électoral performant (Ihl, 2010, p. 24), votes qui prennent souvent une allure de ratification communautaire des notables locaux, avec des processions en bon ordre vers les bureaux de vote, maire, curé et drapeau en tête (Ihl, 2010, p. 30-31), absence de soutien financier ou matériel aux candidats… On doit aussi écrire soi-même ses bulletins de vote, dans une France où l’analphabétisme est encore courant puisqu’il concerne un tiers des conscrits en 1848. Alors même que ces conscrits sont des hommes jeunes qui bénéficient des progrès de la scolarisation primaire. L’analphabétisme devrait donc être encore plus courant dans l’ensemble des électeurs (Antonetti, 2002, p. 711). Cela ouvre la voie à des abus et des suspicions de fraudes (Vigier et Agrneton, 1949, p. 18).
B. Les formes d’une contestation n’excluant pas la participation
La grande nouveauté de 1848 est l’irruption du peuple dans la sphère politique par ses institutions représentatives et par ses manifestations. Si les cortèges et pétitions sont bien antérieurs à 1848, ils acquièrent de Février à Juin une importance nouvelle. Ces mouvements collectifs sont à la fois plus routiniers (plus fréquents et mieux acceptés par le pouvoir) et plus puissants. Précisément, car l’une des conditions d’efficacité d’une marche protestataire est que les individus qu’elle vise doivent la considérer comme un moyen légitime d’action. Ce qui les contraint ensuite à en tenir compte, en cas de succès de la manifestation (ce mot commence à prendre son acception moderne précisément autour de 1848). Ces démonstrations sont si importantes que la chronologie de cette période est souvent opérée en suivant les grandes journées manifestantes : 16 et 17 mars, 16 avril, 15 mai. Dans la différentiation progressive entre manifestation, pétition et émeute, 1848 constitue un important jalon (Tilly, 1972 ; Tartakowsky, 1997 ; Robert 1990 ; Hayat, 2011, p. 434).
Il est intéressant de noter que toutes ces journées ont à voir avec les élections.
La journée du 16 mars voit les soldats des compagnies d’élites de la garde nationale s’en prendre aux circulaires, justement sur les points concernant la conduite à tenir en vue des élections.
La journée du lendemain est une manifestation fleuve de 200 000 personnes, avec les chefs de clubs en tête de cortège, un itinéraire prévu et annoncé par voie d’affiche, soit presque tout ce qui fait une manifestation moderne. Elle vient apporter, via une adresse son soutien au gouvernement après la « manifestation menaçante » de la veille et poser trois demandes toutes en lien avec les élections : le retrait des troupes de Paris « pour que les élections soient parfaitement indépendantes et libres », l’ajournement des élections de la garde nationale au 5 avril (au lieu du 25 mars), l’ajournement des élections à la Constituante au 31 mai (au lieu du 9 avril). Tout ceci afin que le peuple ait « le temps de se concerter et de s’éclairer sur le choix à faire » et puisse voter avec « Une entière indépendance et une parfaite connaissance de cause ». On retrouve là l’influence de Cabet, à l’origine de l’idée de la manifestation (Dommanget, 1972, p. 58), et de Blanqui, partisan d’un délai pour éduquer les citoyens avant le vote. À défaut d’ajournement « il n’y aurait pas de véritables élections. » Une position qui prépare la contestation des résultats de l’élection.
Cette journée est un demi-succès, le gouvernement accepte de proroger les élections constituantes mais seulement jusqu’au 23 avril. Alors que Blanqui était déjà déçu du choix de la date du 31 mai lors des débats entre clubistes (Dommanget, 1972, p. 66). Autant dire qu’il voit cette prorogation de deux semaines comme totalement inutile. Il demande une dernière fois l’ajournement le 20 avril par une adresse (Blanqui, [1848] 1971, p. 96-97).
Le Populaire de Cabet du 30 mars résume la situation : « Cet ajournement, trop long pour les uns, trop court pour les autres, ne satisfait presque personne. », et prépare lui aussi un refus des résultats électoraux : « si les élections sont mauvaises, réactionnaires, contre-révolutionnaires, antirépublicaines, escamotées ou extorquées, ce ne sera pas le jugement souverain du Peuple ! Ce sera l’usurpation de l’aristocratie et de la bourgeoisie ! », or ces partis sont prêts à faire campagne, le peuple ne l’est pas et « par conséquent les élections seront mauvaises ».
La journée du 16 avril débute par une élection à la garde nationale. Les élections des officiers supérieurs de la garde parisienne du 5 avril ont été catastrophiques pour les républicains avancés. A tel point que Guinard, le chef d’état-major de la garde nationale, pour éviter une garde nationale à la hiérarchie toute bourgeoise et aristocratique, décide de garder quatorze postes de capitaines aux ouvriers (Hayat, 2011, p. 472). Dans cette optique, Louis Blanc invite ceux-ci à se réunir au Champ de Mars pour choisir des officiers (ibid.). Au cours de ce rassemblement, on décide de porter une pétition à l’Hôtel de ville pour enjoindre le Gouvernement provisoire, tout en l’appuyant, à renforcer ses mesures sociales.
L’atmosphère est alors tendue, les élections constituantes sont proches et on craint un coup de force de Blanqui. Le rappel est battu, la garde nationale est mobilisée et se place devant l’Hôtel de ville pour barrer le chemin aux manifestants. À leur arrivée, ils sont insultés. La situation est près de dégénérer. La délégation est tout de même reçue, mais seulement par un adjoint au maire. L’événement marque une inflexion importante (Amann, 1975, p. 173-174). L’action directe du peuple sur ses représentants redevient illégitime et on prépare l’hégémonie future de l’Assemblée, seule détentrice de la souveraineté populaire par l’élection. Dans les jours qui suivent, les journaux modérés et conservateurs se félicitent d’un triomphe contre l’anarchie.
Samuel Hayat écrit : « le 16 avril est la dernière manifestation de rue massive qui ne se transforme pas en émeute » (p. 475), et reprenant Hippolyte Castille : le 16 avril marque la fin de « l’époque, sinon la plus brillante, au moins la plus triomphante, de la démocratie parisienne. » (1854, t. 2, p. 184-185). Malgré l’échec de ces journées, les opposants aux élections vont participer à celles-ci. Mais la brièveté de la campagne, alors que le camp républicain est à peine reconstitué après 10 ans d’Empire et 34 années de monarchie censitaire, conduira aux résultats qui étaient prévus par beaucoup.
Le gros de l’enjeu de cette campagne, scrutin de liste oblige, consistait à faire connaître les candidats aux électeurs. Dès lors, les clubs, les corporations ouvrières, les comités électoraux et les journaux proposèrent des listes toutes prêtes. Le club Blanqui adopta sa propre liste de candidats. De même que le Club des clubs, qui regroupait les deux tiers des clubs parisiens à la mi-avril (Hayat, 2011, p. 507). L’Ami du peuple de Raspail, Le Populaire de Cabet, La démocratie pacifique des phalanstériens, ou encore, parmi tant d’autres, La Voix des femmes proposèrent aussi leurs listes. À cela s’ajoutent les listes des comités électoraux (parfois émanation de clubs ou de corporations) et des listes d’initiatives locales ou privées, publiées avec des moyens très disparates (brochures, crieurs, affiches…).
Malgré une aide financière du ministre de l’Intérieur au Club des clubs, la liste qu’il prépare en lien avec des corporations n’est prête que le 22 avril, la veille des élections, et ne concerne que Paris et 12 départements. Auditionner et sélectionner démocratiquement des candidats souvent inconnus prend du temps. Face à eux, le Comité central pour les élections générales prépare des listes par département avec beaucoup moins de discussions et en piochant parmi les anciens notables de la monarchie.
Le résultat est sans appel. Les républicains avancés sont battus, les voix en leur faveur ont été trop peu nombreuses et se sont dispersées.
Le taux de participation de 84% (Chevalier, 2009, p. 235) pourrait étouffer toute contestation des résultats. Mais après les mauvais joueurs, les premières élections au suffrage universel direct masculin font face aux mauvais perdants.
II. CONTESTER APRÈS L’ÉLECTION, REFUSER LES RÉSULTATS
Au regard des résultats, une bonne part des critiques avant l’élection se sont avérées être fondées. Le scrutin de liste a défavorisé les inconnus, la campagne fut trop courte et les paysans ont voté pour les notables. Une prévisibilité qui a pu faciliter la poursuite des contestations. Une fois les plaintes et recours enterrés par la nouvelle assemblée (A), une polarisation encore plus forte du champ politique s’opère, confinant à des modes de contestations plus violents ; d’abord l’émeute et l’invasion de la Chambre, puis l’insurrection et la guerre civile (B).
A. L’impossible contestation légale, l’assemblée comme unique détenteur de la souveraineté
« Jamais peut-être, depuis l’établissement des gouvernements libres, aucune assemblée politique n’avait possédé une force de situation et d’opinion comparable à celle dont l’Assemblée nationale constituante se voyait investie lorsqu’elle ouvrit solennellement ses débats, le 4 mai 1848. Derrière elle, pour la soutenir, la nation entière dont elle était issue par le suffrage universel, exercé pour la première fois dans toute son extension, avec une liberté parfaite et un ordre admirable. Devant elle, table rase. Plus un seul pouvoir debout pour partager son initiative, limiter ses droits ou résister à ses volontés : pas un veto pour en suspendre l’application. Ni roi, ni princes, ni cour, ni ministres, pour lutter avec elle de ruse ou d’audace. » (Stern, 1869, p. 350)
Dès sa première réunion, l’Assemblée proclame la République et les 6 et 8 mai remercie le Gouvernement pour son action. Ces actes pourraient rassurer les milieux révolutionnaires contre le retour de la monarchie, mais ils signifient aussi que l’Assemblée déconsidère la proclamation de la République effectuée devant le peuple parisien à l’issue de la révolution, puisqu’elle a besoin de répéter l’acte plutôt que d’adhérer au régime. Elle se positionne aussi au-dessus du gouvernement, qui devient désormais sa chose et non celle des Parisiens. Implicitement, ce sont aussi les autres instances de représentations populaires qui sont disqualifiées (corporations, clubs…). Elles ne sont même pas citées.
Les premières réactions se retrouvent dans la presse. La critique d’un scrutin non libre et faussé est logiquement reprise après les élections. C’est le cas, parmi beaucoup d’autres, de La Démocratie pacifique du 28 avril, avant même la proclamation officielle des résultats, qui annonce une majorité issue du personnel politique de la monarchie par manque « [d’]éducation sociale », ou de L’ami du peuple du 4 mai qui fustige l’influence des notables sur les paysans « inexpérimentés » et « crédule s». Le Populaire du 11 mai est sur la même ligne concernant l’élection en Ille-et-Vilaine, sous influence du clergé.
S’ajoute à cela des accusations de fraudes massives rapportées dans plusieurs journaux de gauche. De leurs côtés, les journaux conservateurs et modérés, dont Le National, et les commissaires du gouvernement se félicitent du bon déroulement des opérations électorales. Ces derniers minimisent les violences et les cas de fraudes (Ihl, 2010, p. 27) et sont aidés en cela par les procureurs, qui ont reçu comme consigne de restreindre les poursuites pour ne pas raviver les passions qui ont momentanément étaient réveillées lors des élections (Ihl, 2010, p. 13).
Le Populaire du 27 avril écrit que les « manœuvres électorales » sont « innombrables », citant en ce sens Le Représentant du peuple, journal de Fauvety dans lequel Proudhon écrit. Le 30 avril, il réitère : « Par toute la France des fraudes électorales ont été commises », citant à l’appui l’Écho du Nord. Une dénonciation qui continue les 4 et 7 mai. Raspail aussi signale des fraudes, avant même l’annonce des résultats. Pour Paris, il décrit des « actes de négligence, pour ne pas dire davantage », des « urnes restées ouvertes et qu’on avait oublié de sceller », des bulletins de vote modifiés après dépôt, des cartes d’électeurs données en sept exemplaires à une même personne et un cas de tentative d’achat de voix. Le 30 avril, il parle de « centaines de milliers de cas » où des maires ou notables ont menacé des ouvriers s’ils votaient mal, dénonce des urnes non scellées, des votes quintuples et d’autres modifiés après dépôt… Des cas nombreux dont les archives policières et administratives se font l’écho, mais qu’il est très difficile de quantifier (Ihl, 2010, p. 14). L’Assemblée elle-même, lors de la vérification des pouvoirs des députés, doit admettre un assez grand nombre de manœuvres illicites (Grün, 1850).
Le refus des résultats s’exprima aussi dans la rue. La presse rapporte des troubles à Issoire, Issoudun, Champeix, Rochefort, Riom et dans au moins trois lieux l’annonce des résultats prend une tournure plus dramatique encore. À Rouen la garde nationale et les ouvriers déçus entrent en collision. Des barricades sont dressées et il faudra jusqu’au lendemain soir pour que la troupe redevienne maîtresse de la ville. Elbeuf se soulève en solidarité du 28 au 29 avril, avec là encore une intervention de la troupe et des morts. On dénombre entre 24 et 35 morts parmi les insurgés et peut-être un soldat en plus. Après des centaines d’arrestations, 82 personnes sont jugées en Cour d’assises pour Rouen (Peyrou, 1998, p. 553) et 47 pour Elbeuf.
Limoges se soulève également le 27 avril, on prend la préfecture et l’Hôtel de ville, des soldats sont désarmés, des procès-verbaux d’élections déchirés. Les affrontements font plusieurs blessés. Les renforts parviennent à empêcher toute aggravation dès le soir et la ville est quadrillée.
À Nîmes, le vieux conflit entre protestants et catholiques, qui encore au XIXe siècle provoque fréquemment des heurts, s’était traduit par la constitution de deux listes opposées. Une liste républicaine avancée pour les protestants, une liste conservatrice pour les catholiques. Un défilé pour fêter la victoire de la liste catholique, devant un café protestant, est accueilli à coup de revolver. Les manifestants répliquent (2 morts et 15 blessés, Ihl, 2010, p. 23).
Ces mouvements ne débouchent sur rien et sont minimisés par le gouvernement, les commissaires et la presse non socialiste, unanimes derrière l’Assemblée élue.
La contestation n’a pas non plus délaissé les voies légales. Mais l’atrophie du droit électoral et la vérification des pouvoirs des députés par l’Assemblée elle-même ont largement rendu cette voie inopérante. Ainsi, dans le Rhône, le fait que des maires aient omis certains électeurs sur les listes n’invalide pas les élections si cela ne concerne qu’un faible nombre d’individus. Dans ce même département, le fait qu’une commune entière n’ait pas pu voter n’est pas plus une cause d’invalidation. Dans les Basses-Pyrénées, la non-distribution par des maires de cartes électorales n’annule pas l’élection, si cela touche peu de personnes. En Algérie, on valide l’élection de Ferdinand Barrot même si dans un canton une urne ne fut pas scellée, car son avance est telle que même sans une voix de ce bureau, il serait tout de même élu.
À Privas et dans le Puy de Dôme, on accepte des violences, une violation du secret des votes et des intimidations, tant que l’écart des voix est suffisant pour assurer l’élection sans compter les votes de ces bureaux (Ihl, 2010, p.26 et Grün, 1850, p. 72). Idem en Ardèche où des allégations de violences, menaces, destruction de bulletins et une arrestation arbitraire ne suffisent pas à atteindre la validité d’une élection (Grün, 1850, p. 74). Ainsi, il devient plus intéressant, quitte à commettre des fraudes, de provoquer de grandes irrégularités pour s’assurer une large majorité et préserver ainsi la validité de l’élection frauduleusement obtenue.
Pourtant, dans l’Hérault, on annule l’élection de Jean Laissac (Gauche) du fait de l’action du commissaire du gouvernement et de maires qui recommandent ce candidat et font campagne en sa faveur. Est aussi annulée l’élection d’un commissaire du gouvernement, Gent (Gauche), qui use de ses fonctions pour organiser sa campagne. En revanche, une simple circulaire d’un même fonctionnaire en faveur d’un candidat ne suffit pas pour invalider une élection (Grün, 1850, p. 84, 86-87 et p. 89-90).
De façon générale, une irrégularité, même grave, n’invalide pas une élection tant que l’avance du candidat élu est telle que dans l’hypothèse où tous les votes irréguliers seraient en sa défaveur, il serait tout de même élu. Il n’y a donc pas, dans la jurisprudence de 1848, d’irrégularité justifiant par principe une annulation. La nullité n’est pas absolue, mais toujours relative et appréciée in concreto. Il convient de vérifier si l’absence de cette irrégularité aurait pu ou non modifier le résultat de l’élection (Grün, 1850, p. 70). Une théorie qui n’est pas totalement absurde[2] et évite qu’un parti mal intentionné puisse faire annuler toute une élection départementale en provoquant des irrégularités importantes dans un seul canton.
Notons qu’à plusieurs reprises des contestations d’électeurs auprès de l’assemblée sont rejetées sans vérification si leurs dires contredisent les procès-verbaux du scrutin.
Se dégage une volonté globale de validation des pouvoirs, à la fois pour conforter la majorité, mais aussi peut-être précisément face à la présence d’un grand nombre d’irrégularités. Il ne faut pas oublier que jamais autant de citoyens n’avaient été appelés à voter. L’inexpérience des maires, juges de paix, scrutateurs et citoyens occasionne beaucoup d’incidents, souvent burlesques. Une validation globale est également rendue nécessaire par les nombreuses démissions, les élections simultanées d’un même candidat dans plusieurs départements et les quelques annulations. Autant d’événements qui obligent à un second vote. Ainsi, dès le 4 juin, des élections complémentaires de 40 députés ont lieu et le 17 septembre, encore 17 autres doivent être élus.
À contre-courant des accusations de fraude de la presse, on observe que les recours devant la Chambre sont moins nombreux en 1848 qu’en 1849 (Grün, 1850). Ce faible recours au droit nuance l’importance des contestations, mais peut aussi traduire une contestation qui se déroule surtout par voie de presse et par voies publiques, plutôt que par voies de droit. On remarque en ce sens qu’aucune contestation ne s’est élevée dans l’Isère malgré la perte d’une grande partie des procès-verbaux (Vigier et d’Argenton, 1949, p. 19).
Pour les républicains qui ont fait, il y a deux mois à peine, une révolution les armes à la main et qui voit ce pourquoi ils ont lutté leur échapper, l’échec des contestations légales ne peut que radicaliser leur protestation.
B. Une contestation confinée à l’épreuve de force
Le jeu des majorités et des oppositions aurait pu prendre le relais (c’est ce que veut Raspail au lendemain de l’élection), l’opposition socialiste compte tout de même 80 députés et la majorité parlementaire est républicaine. Mais l’Assemblée revint vite et fort sur les acquis des premiers mois et entend retirer aux Parisiens leur capacité d’influence politique directe.
La montée des tensions, quoique progressive et ayant débutée avant les élections, se cristallise le 15 mai puis autour de la question des ateliers nationaux, qui fournissent du travail aux chômeurs. Elle débouche sur une guerre civile sanglante, seulement dépassée depuis par la répression de la Commune de Paris.
La journée du 15 mai, s’ouvre par une manifestation en faveur de la Pologne insurgée. On veut déposer en ce sens une pétition à l’Assemblée, comme on l’a fait depuis deux mois avec le Gouvernement provisoire et comme cela fut possible sous les monarchies censitaires. Mais le dispositif de maintien de l’ordre défectueux et le refus initial de recevoir la délégation (car le droit de pétition a été limité quelques jours plus tôt), entraînent une incompréhension et l’invasion de l’hémicycle par la foule. Aucune violence grave n’est à déclarer, des députés restent sur leurs bancs et écoutent les différents orateurs qui se succèdent à la tribune. Mais le rappel de la troupe momentanément battu et le tumulte général font dériver les revendications vers la question sociale, puis provoquent une déclaration de dissolution de l’Assemblée par Huber, l’un des organisateurs de la journée. Un groupe va constituer un gouvernement nouveau à l’Hôtel de ville pendant que le reste des manifestants se dispersent. La garde nationale n’a aucun mal à rétablir l’ordre et faire arrêter les principaux meneurs, dont Raspail, Blanqui, Barbès, Blanc, Flotte et Sobrier. Les principaux chefs clubistes et une partie de la presse d’opposition sont alors en prison ou en exil.
Mais l’opposition à la politique de l’Assemblée ne faiblit pas. Une nouvelle vague de création de journaux, encore plus radicaux, a lieu, les « journaux rouges » (Hayat, 2011, p. 26-27 et p. 541-551 et Delmas, 1848). Les travailleurs des ateliers nationaux, plus de 105 000 personnes à la mi-juin (Nory, 2021, p. 21), s’organisent en lien avec ces journaux. Les attroupements sont de plus en fréquents dans les rues du fait de cette agitation et de la lutte contre les clubs (Hayat, 2011, p. 26). L’Assemblée réagit en aggravant la répression des troubles collectifs sur la voie publique (loi du 7 juin sur les attroupements).
On s’achemine alors vers l’épreuve de force, que beaucoup d’observateurs voient venir. Raspail, Blanqui et même Ledru-rollin l’annonçaient dès mars. Après coup, Delmas (1848, p. 3) et Tocqueville (1893, p. 194-195 et p. 200-201) rapportent le même état d’esprit : on attend le dénouement par le conflit armé. Celui-ci débute le 23 juin, le lendemain de l’annonce de la dissolution prochaine des ateliers parisiens. Durant trois jours de combats entre 5 400 et 11 500 citoyens trouvent la mort, dont 1 400 à 1 500 forces de l’ordre (Nory, 2021, p. 22). Une intense répression judiciaire débute alors contre environ 11 500 individus, sur 15 à 25 000 arrêtés.
Si la répression judiciaire de la journée du 15 mai avait déjà privé le prolétariat parisien de ses chefs politiques (Marx, 1850, p. 38), les répressions (militaire et juridique) des journées de Juin privent les travailleurs parisiens de leurs membres les plus actifs dans la défense d’une république émancipatrice. Avec l’écrasement de l’insurrection de Juin, le dernier projet alternatif à la république des honnêtes citoyens, libérale mais non interventionniste, disparaît de l’horizon des possibilités politiques. La république démocratique et sociale proposait une organisation institutionnelle où le suffrage universel n’épuisait pas les capacités d’action politique des citoyens, où les institutions issues du vote devaient partager le pouvoir avec d’autres instances représentatives et où la question politique était indissociable de la question sociale. Pour que l’exercice des droits politiques soit pleinement effectif, pour que le vote soit libre, il fallait une amélioration des conditions d’existence des travailleurs.
Après l’insurrection, au cours des débats sur la constitution, « La question du suffrage direct et universel ne fut pas discutée en principe. Tous les partis sentaient également qu’il n’y avait plus d’autre fondement possible à l’autorité politique que la souveraineté du peuple » (Stern, 1869, p.494). On choisit même ce mode du scrutin pour l’élection du Président de la République, prévue pour décembre 1848. Un homme fort face à une Assemblée ayant la même légitimité, sans moyen de régler institutionnellement les conflits qui pourraient s’élever entre ces deux pouvoirs. Un cocktail détonnant qui ne manqua pas de faciliter la chute de la République, moins de quatre ans après son rétablissement.
Ironiquement, c’est en se présentant comme le défenseur du suffrage universel, qu’avait restreint l’Assemblée par la loi du 31 mai 1850, que Louis-Napoléon justifia son coup d’État. Il restaure ce suffrage dès le 2 décembre et continuera, à travers les élections et les plébiscites, sous contrôle, à accoutumer les Français au vote. La IIIe République le reprit logiquement et rétablit sa liberté, terminant de le river à la République (Prélot, 2013). À tel point que Vainberg, avocat et docteur en droit, pu écrire en 1873 un ouvrage intitulé Le Suffrage universel est la République. Ce texte est par ailleurs préfacé par Louis Blanc, membre du Gouvernement provisoire de la Seconde République célèbre pour sa défense du droit au travail, restaurant ainsi le lien qu’avaient établit les contestataires du printemps 1848 entre la défense du suffrage universel et la lutte pour les droits sociaux[3].
Bibliographie
Ouvrages
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Sources
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Le garde national du 1 mars au 3 avril 1848 (23 numéros)
Le Moniteur universel du 27 février au 28 juin 1848
Une bonne partie des textes d’Auguste Blanqui et du Club Blanqui a été numérisé. Voir : https://classiques.uqam.ca/classiques/blanqui_louis_auguste/textes_choisis/textes_choisis.html
https://blanqui.kingston.ac.uk/wp-content/uploads/Blanqui-Maintenant-il-faut-des-armes-2007.pdf
https://blanqui.kingston.ac.uk/texts/
https://www.marxists.org/francais/blanqui/
[1]L’INSEE dénombre, en 2024, 49,3 millions d’électeurs sur 68,4 millions d’habitants.
[2]Elle est reprise par le Conseil Constitutionnel en juge du contentieux électoral. Voir par exemple les décisions n° 2022-5768 AN et n° 2022-5784 AN du 2 décembre 2022.
[3] Un lien que fit aussi, en Allemagne, le programme de Gotha en 1875.
Author :
Gaëtan NORY est doctorant en Histoire du droit à l’université Paris-Panthéon-Assas